Beaucoup d’incertitudes continuent de peser lourdement sur l’économie mondiale : contexte géopolitique tendu, crainte des répercussions en cascade de la crise immobilière sans précédent de la Chine, probable récession de l’Allemagne dont le modèle industriel vacille, inflation influant négativement sur la consommation et la production, durcissement des conditions monétaires et financières, emballement du réchauffement climatique… Pourtant, l’économie mondiale apparaît aujourd’hui moins contrainte qu’en 2022 et les prédictions les plus sombres de fin d’année n’ont pas eu lieu.

En savoir plus

Dans ce contexte morose, la France peine à tirer son épingle du jeu, avec une croissance modérée mais hésitante, freinée par une consommation en berne sous l’influence de prix toujours élevés bien que l’inflation soit plus contenue qu’ailleurs. Le climat d’inquiétude reste fort, tant pour les ménages que les entreprises, sur fond de remontée du coût de l’énergie et de sortie progressive du bouclier énergétique. La bonne nouvelle vient de l’emploi, dont le volume a continué de croître tandis que le chômage diminue, mais le secteur de la construction entre bel et bien en crise. Selon les experts, l’inflation pourrait refluer quelque peu d’ici la fin de l’année mais l’activité devrait être peu dynamique, soulignant le caractère éphémère de l’embellie observée au printemps.

GraphClavier E 97619105 S

Le paysage économique local s’inscrit pleinement dans ce contexte et au final se singularise assez peu. Beaucoup d’indicateurs sont au vert ou bien orientés mais quelques signaux négatifs, de plus en plus perceptibles, appellent à la prudence et à la vigilance.

Alors que le Loir-et-Cher se distinguait en 2022 par une croissance vigoureuse de l’emploi salarié du secteur privé non agricole, il enregistre cette année une progression deux fois moindre que celle de la région (+ 0,5 %, soit un gain de 430 postes sur 12 mois, contre 1 %), elle-même se situant en deçà de la dynamique du pays. Au sein du département, la situation est contrastée entre d’une part les zones d’emploi de Vendôme (+ 1 % en rythme annuel) et de Romorantin-Lanthenay (+ 0,9 % malgré un recul sensible en ce début d’année), et d’autre part la zone de Blois, relativement stable (+ 0,1 %) mais affichant le résultat le plus faible des zones d’emploi de la région, situation inverse à celle des deux années précédentes. Il semble par ailleurs que l’emploi salarié aurait également progressé dans le secteur public.

La poussée actuelle de l’emploi est surtout portée par l’hôtellerie, dans une moindre mesure par la restauration, et plus généralement par les services. En revanche les pertes de l’industrie (hors secteur du cuir) tendent à s’amplifier alors que cette activité se redresse dans la plupart des autres départements de la région ; le secteur de la construction, de nouveau confronté à une crise sévère, amorce une nouvelle phase de suppression d’emplois ; l’intérim se stabilise à un haut niveau.

Cette progression de l’emploi, même légère, a des incidences sur le marché du travail. Le chômage poursuit son reflux à un rythme soutenu, quelles que soient les catégories de demandeurs, et particulièrement pour les chômeurs de longue durée. Le taux départemental (5,8 %) demeure le plus bas de la région ; celui de Vendôme (5,4 %) est le plus faible des zones d’emploi du Centre-Val de Loire ; celui de Romorantin-Lanthenay (6,1 % soit -0,4 point en un an) est désormais très proche du niveau départemental. Globalement le département compte fin juin 2023 plus de 22 400 demandeurs d’emploi inscrits dans les catégories A, B ou C (sans emploi, disponibles, ayant travaillé ou non dans le mois), soit un recul de 3,8 % en un an, et même de 5,7 % pour la seule catégorie A (sans aucun emploi).

Dans l’ensemble, l’activité locale paraît avoir été plutôt soutenue y compris en ce début d’année, ainsi qu’en attestent les volumes de chiffres d’affaires réalisés, chaque année plus importants. La saison touristique a été bonne en dépit de la mauvaise météo et de l’inflation. Le Loir-et-Cher semble se démarquer aussi par un effort très appuyé des entreprises en faveur de l’investissement. Leur situation financière continue de s’assainir, les trésoreries sont jugées correctes ; les retards de règlement des cotisations sociales sont à leur plus bas niveau depuis une dizaine d’années. Toutefois les délais de règlement semblent s’allonger, signe avant-coureur d’un possible retournement, tandis que parallèlement les défaillances d’entreprise se multiplient et sont revenues fin 2022 à leur niveau d’avant-crise sanitaire. Autre point d’inquiétude, le recul très net de la construction de logements surtout lié à l’effondrement des opérations collectives pour lesquelles cependant on note un redressement des autorisations délivrées ; la construction de logements individuels, bien qu’en recul par rapport à 2022, semble demeurer à un niveau plutôt élevé.

Si on s’en tient aux enquêtes locales de conjoncture, les prévisions d’activité sont assez bonnes pour les mois à venir, et les rangs des dirigeants optimistes l’emportent largement sur ceux des pessimistes. Néanmoins, comme le souligne la Banque de France, on constate un clivage grandissant entre d’une part une majorité d’entreprises ayant une activité fournie et de belles perspectives et d’autre part des sociétés dont les difficultés et les inquiétudes s’amoncellent. L’optimisme doit donc être nuancé.

Globalement, les problèmes de recrutement perdurent et un employeur sur deux dit aujourd’hui y être encore confronté. Le maintien et la fidélisation des effectifs en place sont aussi au cœur des priorités tant les tensions sont vives sur le marché du travail. Les besoins locaux restent considérables, quels que soient les secteurs d’activité et les territoires : projets de développement des entreprises, implantations, remplacement des 2 600 personnes partant à la retraite chaque année... L’équation reste difficile à résoudre du fait d’un faible taux de chômage et d’une population active en recul (- 4 500 entre 2014 et 2020). De ce point de vue, la question de l’attractivité du département occupera une place de plus en plus centrale.

Le recul du pouvoir d’achat combiné à la hausse sans précédent du coût de l’énergie auront par ailleurs de fortes répercussions sociales, encore impossibles à mesurer, notamment sur les ménages économiquement les plus fragiles, souvent en situation de précarité énergétique (logement et/ou déplacement), et plus particulièrement ceux résidant dans les zones rurales éloignées des pôles d’emploi et de service. Tout au plus observe-t-on une hausse sensible au cours du premier semestre des aides sollicitées pour le maintien dans le logement, tandis que le nombre des ménages surendettés reste stable comme celui des foyers allocataires du RSA : 6 788 à fin juillet 2023 selon le Conseil départemental,  comme en janvier dernier. Fin 2022, le Loir-et-Cher comptait près de 17 000 ménages à bas revenus, soit 400 de plus que fin 2019 (+ 2,4 %), mais en net recul par rapport à 2021 (- 7,2 %). Une attention vigilante devra donc être portée au suivi de l’évolution de la pauvreté dans les prochains mois.

Au final le panorama économique du département paraît plutôt positif en cette période de rentrée, en dépit des menaces et des nuages qui s’amoncellent, et surtout en décalage avec le ressenti de beaucoup d’acteurs économiques. Les prochains mois, et plus encore 2024, pourraient marquer un véritable retournement de la conjoncture.

Les cookies assurent le bon fonctionnement de nos services. En utilisant ces derniers, vous acceptez l'utilisation des cookies.